Mardi, on a rejoint "les petits" à Hossegor sur le coup de midi. Histoire de passer deux jours ensemble, le travail appelant Sébastien à Toulouse dès vendredi matin. Un temps de grains, de bourrasques de vent et de tempête. Les arbres secoués en tous sens. Les pins élancés et souples, les chênes-lièges plus compacts et solidaires, les mimosas légers comme des dentelles : trois statégies efficaces pour lutter contre les assauts du vent. Qui finit toujours par se calmer... Le temps était mauvais, peu propice aux balades en forêt ou le long de la plage, mais, peu importe, Sébastien, Nadja, Charlotte et Camille... et même Françoise, tout le monde ou presque - moi seul résistant aux sirènes technologiques - avait de quoi tenir un siège de longue durée : cinq ordinateurs portables, une tablette numérique, six téléphones mobiles, deux téléviseurs, deux lecteurs de dvds... Quand le temps n'est pas favorable, la villa devient un aquarium ou une ruche, c'est selon : une tribu d'autistes.
On se retrouve pourtant à chaque repas et c'est toujours un plaisir d'entendre les filles et parfois les plus grands s'approcher de la table en s'exclamant : "Mamou, ça sent bon ! Qu'est-ce-que tu as préparé ?". Et, de leurs doigts agiles, elles grappillent qui une frite ou une feuille de salade, qui un morceau de viande ou une lichette de fromage. Mardi soir justement, comme on fêtait l'anniversaire de Charlotte (le 5) et le mien (le 8), on a ouvert une bouteille de Sainte Croix du Mont. On l'avait tirée de la cave familiale, à Dax, où la soeur de Françoise veille sur quelques trésors du même tonneau, si j'ose dire. On aurait dit que la bouteille était elle-même une source de lumière. Une couleur composée de toutes les nuances du jaune d'or à l'orange de feu. Un bonheur pour les yeux. On craignait un peu que cette merveille soit madérisée et que le vin ne se soit disloqué. Il n'en fut rien. Les mots me manquent pour décrire ce que c'est que de boire un si délicieux breuvage. D'après la soeur de Françoise, la gardienne du temple, il reste la jumelle de cette bouteille. A déguster pour une occasion à marquer d'une pierre blanche.
Pendant notre bref séjour à Hossegor, on est allé voir une exposition au casino. Une cinquantaine d'oeuvres d'un peintre basque, né en 1967 à Bilbao : Pablo Ugartetxea. Il parcourt le monde poussé par sa passion pour le surf une moitié de l'année ; l'autre moitié, il vit à Hossegor. Il peint sur papier ou sur carton suivant une technique qui combine l'huile, des collages de photographies ou de croquis, du dessin à l'encre de Chine, et peut-être quelque autre procédé qui m'a échappé. Son format est environ de 77x55 cms. Ses peintures représentent des paysages et des scènes que je qualifierais de mi-réalistes mi-imaginaires. Par exemple, ci-dessous, une vue intitulée "Hossegor Mahal 2" où l'on peut reconnaitre la plage d'Hossegor un jour de compétition, la tour de l'église, comme un minaret, et le Taj Mahal.
Cette autre peinture, "Hossegor Swell" évoque la houle qui vient sans cesse animer ses plages ; représentation plutôt réaliste, mais inscrite dans un environnement incertain, qui nous fait entrer comme dans un rêve. Un vrai style qui, comme tout style fort, peut parfois faire penser à un procédé. En tout cas, le parcours de l'exposition est bien de nature à provoquer notre imaginaire en multipliant les court-circuits entre Biarritz et Rio, entre Blibao et Pompéï, entre San Sebastian et Paris, entre Bilbao encore et New York...
Et puis, jeudi soir, à notre arrivée vers 22 heures à Pau, il était bien là dans la boite à lettres, le cd
"Schmelz" du Christian Zendher Quartett. J'ai dit, dans un post précédent, comment en effet un courriel amical m'avait suggéré de l'écouter, en particulier Ch. Zendher lui-même, qui chante d'une manière indéfinissable. Le premier morceau,
"Melancholie", fait penser à une tango de Carlos Gardel chanté, pour le phrasé, par un Paolo Conte avec le timbre de voix d'Arno. Pour le reste, on va de surprises en surprises : chants de shamans, voix venus de Sibérie, échos répercutés sans fin de sommet en sommet des Alpes suisses, sons rapportés par des ethnologues du fin fond de l'Australie centrale... En tout cas, c'est fascinant. Sans oublier le "Swiss Cimbalon" de Barbara Schimer.
Et puis, vendredi, il fallait bien aller faire quelques courses de réapprovisionnement. Direction l'hyper Leclerc. Rituel : on remplit le caddy, on passe à la caisse, on charge la voiture, on referme la malle arrière, on va faire un tour au Parvis. Histoire de voir si... Eh bien justement, on repère tout de suite, en tête de gondole, le dernier opus du Cuarteto Cedron. On a une tendresse particulière et de longue date pour cette formation. On est sensible à la voix de Juan Cedron. Pas d'hésitation. En fait, comme on peut le voir sur l'arrière de la pochette, le cd comprend deux albums :
"Corazon de Pie Afuera" et
"Godino".
Ce double album est un bel objet avec des illustrations énigmatiques, de facture assez surréaliste, et un livret complet avec textes de présentation et textes des chansons. Une première écoute en déjeunant samedi nous convainc que c'est bien un "cuarteto cedron": nostalgie, émotion, boulot bien fait...
De tout cela, bien sûr, je reparlerai, mais pour l'heure je voulais faire un peu le point sur toutes ces belles choses. Leur rappel est déjà, en tant que tel, un vrai bonheur.