http://www.zaragraf.org/
Connaissez-vous Zaragraf ? Pour ma part, jusqu'à hier, je ne connaissais que le nom de cette formation. Pour je ne sais quelle raison, je n'avais jamais eu la curiosité ou l'occasion de chercher à mieux la connaitre. Peut-être parce qu'il me semblait qu'elle ne comprenait pas d'accordéoniste dans son personnel. Mais hier, j'ai découvert le nouvel album de Zaragraf, son sixième, dont la sortie est annoncée pour le 6 janvier 2014: "
Vaga Mundo Gadgé", label Mélodia, distribution L'autre distribution. Avant de dire quelques mots quant à mes premières impressions après quatre écoutes successives, deux informations :
- En présentation de son album, Zaragraf se présente comme "un cabaret fantastique balkano, flamenco, tsigano, latino, rock and rollo". La rencontre des musiques méditerranéennes, de l'est de l'Europe et de l'esprit anglo-saxon. Voilà pour l'esprit. En écoutant les treize morceaux de "
Vaga Mundo Gadjé", c'est l'image du costume d'Arlequin qui me vient à l'esprit. Multiple, éclatant, flamboyant et, malgré sa diversité, harmonieux et cohérent.
- La composition de l'équipe donne une idée de la musique qu'elle pratique et de la manière dont elle met en musique son projet. Je cite : "Mira Mrak, chant, violon, tambour ; Emmanuel Waffler, chant, guitares, computer ; Bruno Manjarres, chant, guitare flamenca, trompette ; Pepe Martinez, chant, tuba, accordéon, cajon. A ce quartet s'ajoutent deux invités : Michel Altier, contrebasse ; Laurent Eurly, saxo alto, soprano".
Disons-le d'emblée, dès l'introduction du titre 1, on en prend plein la gueule. La voix de Mira Mrak, c'est quelque chose. Pour ma part, je ne m'en suis pas remis durant ma toute première écoute. Une voix difficile à définir entre celle d'Alice, de la Pythie de Delphes et d'un griot vaudou. En tout cas, à coup sûr, étrange et envoûtante. Elle donne le ton de l'album. Pour moi, elle en est le fil rouge. Elle est comme la signature du groupe.
Avec le titre 2, la contrebasse et la guitare évoquent pour moi un état d'âme apparenté à la saudade. Une nostalgie sans tristesse, comme un souffle d'air au bord de la mer, immense et infinie. C'est de rêverie qu'il s'agit ici.
- Le titre 3, c'est du flamenco. L'accordéon donne le vague à l'âme.
De titre en titre, c'est un voyage que nous propose Zaragraf. Il s'agit bien d'un même monde, dont on a vu qu'on pouvait le localiser dans le pourtour méditerranéen, mais ce monde défile devant nos oreilles comme un kaléidoscope. Autre image qui me vient à l'esprit et qui pour moi est proche de celle du costume d'Arlequin. Une succession comme autant de facettes qui, de titre en titre, s'organisent comme un puzzle.
- Ce qui m'a frappé dans le titre 4, c'est, outre la guitare et la trompette, la voix fascinante de Mira Mrak. J'ai parlé plus haut d'une voix étrange et envoûtante. Je parlerais volontiers ici de son pouvoir hypnotique.
- A coup sûr, le titre 5 m'a fait penser à la musique de Titi Robin. La parenté m'a paru évidente. La voix flamenca m'a suggéré des rapprochements avec un certain disque des Rumberos Catalans, où Francis Varis donne toute la mesure de son talent. L'accordéon de Pepe Martinez est pour moi de la même famille que celui de F. Varis. Pour l'heure, peut-être à cause de ce rapprochement, ce titre est mon préféré.
- Le titre 6 avec sa guitare et son cajon (ou autres percussions) m'a fait penser à une sorte de course éperdue et devant mes yeux ont défilé comme des images tirées de certains films de Fellini. Une onctuosité inquiétante. Quelque chose de l'ordre du rêve.
- Avec le titre 7, c'est la Sardaigne ou la Sicile, en tout cas cette Italie du Sud, qui me vient à l'imagination. A certains moments, j'ai pensé à une comptine pour adultes.
- Le titre 8, c'est d'abord une trompette, qui sonne comme celles des mariachis. C'est pourquoi j'ai pensé au Mexique ou à la Colombie.
- Le titre 9 "
Jambalaya", c'est la bande-son d'un dessin animé façon Tex Avery ou, peut-être, d'un film muet de Buster Keaton.
- Le titre 10, l'accordéon, la voix, ça sonne comme une déambulation grinçante avec toujours une certaine distance, qui se traduit par un humour pince sans rire.
- Le titre 11, "
Travelling across Europa" est emblématique de la totalité de l'album. J'ai pensé à un album que j'estime beaucoup, qui se présente comme le dernier voyage de l'Orient Express :"
Boris Kovac et Ladaaba Orchest / The Last Balkan Tango". J'ai pensé aussi à un disque qui s'intitule, je crois :"
Mahala Raï Banda", un disque venu de Roumanie, dont l'inspiration me parait proche de celle de Zaragraf. Forcément, on ne peut pas ne pas penser à Kusturica... C'est dire...
- Le titre 12 me conforte dans le rapprochement avec les Rumberos Catalans. Comme c'est un disque que j'apprécie au plus haut point, autant dire, sans plus tergiverser, le plaisir que j'ai pris à écouter "
Vaga Mundo Gadjé".
- Enfin, pour le titre 13, c'est le violon et l'accordéon qui donnent le ton. Un ton, si j'ose dire, aigre-doux. Une certain façon de percevoir et de raconter le monde.
Pour finir, je tiens à signaler la qualité des arrangements et la qualité technique de l'enregistrement. C'est clair, net et précis. Bref, une formation qui, avec ce sixième album, trace sa route hors des sentiers battus. Maintenant, il ne me reste plus qu'à faire connaissance avec les cinq disques précédents de Zaragraf... Plus je connais de disques, plus je prends conscience que le nombre de ceux que j'ignore augmente.