lundi 2 février - où il est question du rôle ambigu des préjugés
On peut lire les phrases suivantes dans l’éditorial du dernier numéro de la revue « Accordéon & accordéonistes », n° 83, février 2009 :
« Quel instrument dans son histoire a conquis autant de musiciens et de musiques que l’accordéon ? Alors, loin des querelles [musette vs jazz vs classique], nous nous passionnons pour la petite lame dans tous les corps à soufflet possible ! Notre joie, nos émotions sont (et seront ) toujours les mêmes quand les musiciens sont bons, qu’ils jouent du forro au fin fond du Nordeste brésilien ou du classique au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. Rien n’est beau sans la diversité ».
Cette prise de position me convient bien et j’approuve spontanément cette affirmation pour des raisons à la fois esthétiques et éthiques. Bien plus, je dois dire que, même s’il est bon de rappeler sans cesse cet impératif d’ouverture d’esprit, je le lis comme une évidence pour moi. Et puis, je parcours ce dernier numéro d’ « Accordéon & accordéonistes » où je peux de page en page vérifier son application, sauf peut-être en ce qui concerne l’accordéon de concert. En tout cas cette première lecture me conforte dans mon opinion.
Mais voilà qu’en parcourant les chroniques, je tombe sur l’une d’entre elles, qui attire mon attention. Signée C.L., elle présente un cd : « Les Bouses Brothers / Les cultivateurs ». Chronique synthétique, mais qui donne une bonne idée de ce que l’on peut attendre de ce disque. Je cite : « Un CD atypique autour du succès Vive les cultivateurs, écrit par René Grolier et Marc Provance. Bérets de travers et bottes de caoutchouc mais en costumes endimanchés, on s’en va à la campagne… ». Pour ne pas citer la chronique in extenso, je résume : il est question de valses, de tangos, de twists, de country, de marches, de pasos… « Sans oublier une bonne grosse dose d’humour ». Les musiciens ne sont pas, nous dit on, identifiables, mais ils sont talentueux. Et plus loin, « Avec l’accent du terroir, les poules et les coqs en fond de piste, la bonne humeur règne ».
Je prends conscience alors que malgré toute la précision et sans doute la pertinence de cette chronique, je n’ai pas envie d’écouter ce cd. Pourtant, lisant l’éditorial et l’approuvant spontanément, je pensais faire preuve de plus d’ouverture d’esprit. Je prends donc brutalement conscience d’une limite à mon éclectisme et donc de la force de mes préjugés. Je savais bien, abstraitement, que l’on n’y échappe pas, mais la prise de conscience est brutale.
Qui sera capable de me faire apprécier à sa juste valeur cet opus des Bouses Brothers, « Les cultivateurs » ? Qui saura m'en faire percevoir l'humour ? M'initier à la bonne grosse dose d'humour qu'il recèle ?
Et justement à propos de préjugés ou plus exactement de pré-jugements, cet autre exemple me vient à l'esprit : au cours du déjeuner que nous avons partagé, le samedi 24, avec Bruno Maurice et Eléonore, à leur invitation, nous avons parlé de la série du « matin des musiciens » consacrée à l’accordéon. De l’émission consacrée à Bruno et de celle qui présentait Yuri Shishkin. Comme nous lui disions notre plaisir d’avoir découvert et apprécié cet accordéoniste, Bruno nous dit en quelle grande estime il le tenait. Il n’en fallait pas plus pour nous inciter à nous procurer son disque composé de la Sonate n°6 d’Anatoly Kusiakov et des Tableaux d’une exposition de Mussorgsky. Et pour nous préparer à son écoute dans les meilleures dispositions d’esprit. Il s’agit bien donc en l’occurrence d’une attitude de pré-jugé. La confiance que nous accordons à Bruno nous a renforcés dans notre impression première et a formé en nous une attente positive, attentive et bienveillante. Et de fait le plaisir est bien au rendez-vous.
J’ajoute qu’en écoutant cet album, nous nous sommes avisés, ce que nous avions oublié, que nous avions une autre version des "tableaux" sur le disque « Duos for Classical Accordions » de James Crabb et Geir Draugsvoll, 1997, EMI Classics. L’écoute croisée de ce cd et de celui de Yuri Shishkin nous enchante. Nous sommes encore dans la phase d’immersion et bien loin de pouvoir expliciter les différences que nous commençons à percevoir. Mais l’apprentissage est en cours.
Bon… Je reviens à mon propos initial : que ce soit avec des effets négatifs (attentes réservées, froides, voire hostiles) ou positifs (attentes accueillantes, bienveillantes, chaleureuses), les préjugés ont souvent un rôle déterminant dans nos perceptions. Mais finalement ce n’est pas si mal, car nos préjugés se forment aussi en grande partie sur nos expériences et nos jugements antérieurs. Ils peuvent parfois orienter nos choix de manière à nous éviter des erreurs ou de nous fourvoyer ou a contrario nous aider à faire des choix intuitifs bien fondés. Parfois, mais pas à coup sûr !
« Quel instrument dans son histoire a conquis autant de musiciens et de musiques que l’accordéon ? Alors, loin des querelles [musette vs jazz vs classique], nous nous passionnons pour la petite lame dans tous les corps à soufflet possible ! Notre joie, nos émotions sont (et seront ) toujours les mêmes quand les musiciens sont bons, qu’ils jouent du forro au fin fond du Nordeste brésilien ou du classique au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. Rien n’est beau sans la diversité ».
Cette prise de position me convient bien et j’approuve spontanément cette affirmation pour des raisons à la fois esthétiques et éthiques. Bien plus, je dois dire que, même s’il est bon de rappeler sans cesse cet impératif d’ouverture d’esprit, je le lis comme une évidence pour moi. Et puis, je parcours ce dernier numéro d’ « Accordéon & accordéonistes » où je peux de page en page vérifier son application, sauf peut-être en ce qui concerne l’accordéon de concert. En tout cas cette première lecture me conforte dans mon opinion.
Mais voilà qu’en parcourant les chroniques, je tombe sur l’une d’entre elles, qui attire mon attention. Signée C.L., elle présente un cd : « Les Bouses Brothers / Les cultivateurs ». Chronique synthétique, mais qui donne une bonne idée de ce que l’on peut attendre de ce disque. Je cite : « Un CD atypique autour du succès Vive les cultivateurs, écrit par René Grolier et Marc Provance. Bérets de travers et bottes de caoutchouc mais en costumes endimanchés, on s’en va à la campagne… ». Pour ne pas citer la chronique in extenso, je résume : il est question de valses, de tangos, de twists, de country, de marches, de pasos… « Sans oublier une bonne grosse dose d’humour ». Les musiciens ne sont pas, nous dit on, identifiables, mais ils sont talentueux. Et plus loin, « Avec l’accent du terroir, les poules et les coqs en fond de piste, la bonne humeur règne ».
Je prends conscience alors que malgré toute la précision et sans doute la pertinence de cette chronique, je n’ai pas envie d’écouter ce cd. Pourtant, lisant l’éditorial et l’approuvant spontanément, je pensais faire preuve de plus d’ouverture d’esprit. Je prends donc brutalement conscience d’une limite à mon éclectisme et donc de la force de mes préjugés. Je savais bien, abstraitement, que l’on n’y échappe pas, mais la prise de conscience est brutale.
Qui sera capable de me faire apprécier à sa juste valeur cet opus des Bouses Brothers, « Les cultivateurs » ? Qui saura m'en faire percevoir l'humour ? M'initier à la bonne grosse dose d'humour qu'il recèle ?
Et justement à propos de préjugés ou plus exactement de pré-jugements, cet autre exemple me vient à l'esprit : au cours du déjeuner que nous avons partagé, le samedi 24, avec Bruno Maurice et Eléonore, à leur invitation, nous avons parlé de la série du « matin des musiciens » consacrée à l’accordéon. De l’émission consacrée à Bruno et de celle qui présentait Yuri Shishkin. Comme nous lui disions notre plaisir d’avoir découvert et apprécié cet accordéoniste, Bruno nous dit en quelle grande estime il le tenait. Il n’en fallait pas plus pour nous inciter à nous procurer son disque composé de la Sonate n°6 d’Anatoly Kusiakov et des Tableaux d’une exposition de Mussorgsky. Et pour nous préparer à son écoute dans les meilleures dispositions d’esprit. Il s’agit bien donc en l’occurrence d’une attitude de pré-jugé. La confiance que nous accordons à Bruno nous a renforcés dans notre impression première et a formé en nous une attente positive, attentive et bienveillante. Et de fait le plaisir est bien au rendez-vous.
J’ajoute qu’en écoutant cet album, nous nous sommes avisés, ce que nous avions oublié, que nous avions une autre version des "tableaux" sur le disque « Duos for Classical Accordions » de James Crabb et Geir Draugsvoll, 1997, EMI Classics. L’écoute croisée de ce cd et de celui de Yuri Shishkin nous enchante. Nous sommes encore dans la phase d’immersion et bien loin de pouvoir expliciter les différences que nous commençons à percevoir. Mais l’apprentissage est en cours.
Bon… Je reviens à mon propos initial : que ce soit avec des effets négatifs (attentes réservées, froides, voire hostiles) ou positifs (attentes accueillantes, bienveillantes, chaleureuses), les préjugés ont souvent un rôle déterminant dans nos perceptions. Mais finalement ce n’est pas si mal, car nos préjugés se forment aussi en grande partie sur nos expériences et nos jugements antérieurs. Ils peuvent parfois orienter nos choix de manière à nous éviter des erreurs ou de nous fourvoyer ou a contrario nous aider à faire des choix intuitifs bien fondés. Parfois, mais pas à coup sûr !
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