mardi 8 juin - un week-end sous le signe de marcel
Nous n'avions jamais eu l'occasion d'aller écouter Marcel Azzola en direct live. En février, Françoise avait repéré qu'il était à l'affiche du 1er festival de jazz de Saint Loubès, le 5 juin. Saint Loubès est un village au nord de la capitale girondine, à environ 25 kilomètres. C'est la région, entre Garonne et Dordogne, des 1ères côtes de Bordeaux. C'est ainsi que samedi en fin de matinée nous nous sommes mis en route, par une nationale toujours aussi improbable, qui croise, croise et recroise maintes fois l'autoroute en construction, avant d'arriver à Langon et aux quarante kilomètres de l'autoroute Toulouse-Bordeaux. Le temps de déposer nos bagages à l'hôtel, d'acheter des tickets de tramway... Promenade le long des quais. La façade XVIIIème des quais toujours aussi admirable. Architecture et urbanisme d'une société pétrie de cartésianisme. Une façade magnifique. Un décor. Il faut s'engager dans les rues autour de Saint Michel, du marché des Capucins, du cours Victor Hugo ou du quai des Salinières pour s'immerger dans un monde grouillant, vivant, bordélique et comprendre à quel point cette façade n'est qu'un décor. Le triomphe de l'alexandrin et du théâtre classique d'une part, le triomphe de l'improvisation, de Pulcinella, de Scaramouche et de Zanni d'autre part.
En milieu d'après-midi, nos pas nous guident vers les entrepôts Lainé, le CAPC Musée d'art contemporain. Deux expositions magnifiques : l'une de Jim Shaw, qui propose une quinzaine d'immenses peintures figuratives sur d'anciens rideaux de scènes. Une forme académique pour les détails, une plongée quasi psychanalytique dans l'inconscient, les fantasmes, les symboles de l'Amérique profonde. Troublant. Entre traumatisme du 11 septembre, cauchemar irakien et rêves éternels d'un Midwest élevé au rang de mythe fondateur.
Dans les étages, autre exposition :"CAPC ou la vie saisie par l'art". Entre autres, une oeuvre de Boltanski, "Inventaire des objets ayant appartenu à la jeune fille de Bordeaux", qui m'a fait penser au travail de classification de Perec.
Au moment de quitter le musée, je ne peux résister au plaisir de photographier la chaise et le journal de l'un des surveillants, qui s'est momentanément absenté. Moi aussi, j'apporte ma contribution à ce projet classificatoire en fixant cette image, qui relève de l'art aléatoire puisqu'elle n'a pas été préparée intentionnellement, mais simplement choisie comme objet artistique par la volonté de mon regard.
Le soir, concert à 21 heures. Placement libre. A 20 heures, nous avons fini notre pique-nique sur la pelouse devant la Coupole, la salle de spectacle. A 20h15, ouverture des portes. On s'installe au mieux et l'on observe, amusés, qu'au fur et à mesure des entrées l'âge moyen monte, monte, monte... Le programme annonçait "Marcel Azzola et Dany Doriz". Je n'avais aucune idée de qui était Dany Doriz. En fait, c'est un vibraphoniste. Il est directeur du Caveau de Huchette. Il est venu en quartet : vibraphone, piano, contrebasse, batterie. Le concert commence par "Double Scotch" de Marcel Azzola, en l'absence de celui-ci, qui n'apparait qu'au second morceau. L'organisation est formatée. Alternance de jeu collectif hyper-cadré et d'improvisations plus ou moins attendues. Je ne sais pourquoi l'expression de jazz de salon me vient à l'esprit. Des compositions de Doriz, d'Azzola, de D. Ellington, d'H. Silver, de G. Mulligan, de M. Fosset. Un jazz sans surprise, mais agréable.
Je porte toute mon attention sur les attitudes, la posture et les mains de Marcel Azzola. Son jeu, économique, me touche. Je suis frappé par le mouvement de ses mains : très serrées. Amplitude du geste très réduite. Du coup, une douceur extraordinaire. Un toucher, comme une caresse, qui n'exclut pas un tout aussi extraordinaire sens du swing. Pas d'éclats, tout est dans les nuances, dans l'art du glissement.
En milieu d'après-midi, nos pas nous guident vers les entrepôts Lainé, le CAPC Musée d'art contemporain. Deux expositions magnifiques : l'une de Jim Shaw, qui propose une quinzaine d'immenses peintures figuratives sur d'anciens rideaux de scènes. Une forme académique pour les détails, une plongée quasi psychanalytique dans l'inconscient, les fantasmes, les symboles de l'Amérique profonde. Troublant. Entre traumatisme du 11 septembre, cauchemar irakien et rêves éternels d'un Midwest élevé au rang de mythe fondateur.
Dans les étages, autre exposition :"CAPC ou la vie saisie par l'art". Entre autres, une oeuvre de Boltanski, "Inventaire des objets ayant appartenu à la jeune fille de Bordeaux", qui m'a fait penser au travail de classification de Perec.
Au moment de quitter le musée, je ne peux résister au plaisir de photographier la chaise et le journal de l'un des surveillants, qui s'est momentanément absenté. Moi aussi, j'apporte ma contribution à ce projet classificatoire en fixant cette image, qui relève de l'art aléatoire puisqu'elle n'a pas été préparée intentionnellement, mais simplement choisie comme objet artistique par la volonté de mon regard.
Le soir, concert à 21 heures. Placement libre. A 20 heures, nous avons fini notre pique-nique sur la pelouse devant la Coupole, la salle de spectacle. A 20h15, ouverture des portes. On s'installe au mieux et l'on observe, amusés, qu'au fur et à mesure des entrées l'âge moyen monte, monte, monte... Le programme annonçait "Marcel Azzola et Dany Doriz". Je n'avais aucune idée de qui était Dany Doriz. En fait, c'est un vibraphoniste. Il est directeur du Caveau de Huchette. Il est venu en quartet : vibraphone, piano, contrebasse, batterie. Le concert commence par "Double Scotch" de Marcel Azzola, en l'absence de celui-ci, qui n'apparait qu'au second morceau. L'organisation est formatée. Alternance de jeu collectif hyper-cadré et d'improvisations plus ou moins attendues. Je ne sais pourquoi l'expression de jazz de salon me vient à l'esprit. Des compositions de Doriz, d'Azzola, de D. Ellington, d'H. Silver, de G. Mulligan, de M. Fosset. Un jazz sans surprise, mais agréable.
Je porte toute mon attention sur les attitudes, la posture et les mains de Marcel Azzola. Son jeu, économique, me touche. Je suis frappé par le mouvement de ses mains : très serrées. Amplitude du geste très réduite. Du coup, une douceur extraordinaire. Un toucher, comme une caresse, qui n'exclut pas un tout aussi extraordinaire sens du swing. Pas d'éclats, tout est dans les nuances, dans l'art du glissement.
Le concert est réparti en deux moments avec un entr'acte où chacun va se rafraîchir au bar. Au cours du second moment, Marcel Azzola, solo, interprète un pot-pourri de chansons de Brel. Pot-pourri ou, pour faire mode, medley, dit-il, car il ne manque pas d'humour. Ni de professionnalisme. Pour preuve, après le concert, sa disponibilité pour signer les disques mis en vente.
Vers minuit, un SMS des "petits" nous informe qu'ils sont à Marseille, que tout va bien, que Charlotte a chanté, solo, avec sa chorale d'adultes et qu'elle a eu un beau succès. De son côté, Camille a fait des photographies du concert et de sa soeur en particulier.
Le lendemain, temps maussade. Nous hésitons à rentrer sur Pau. Finalement, nous décidons d'aller faire un tour au Musée des Beaux-Arts. Heureuse idée : les oeuvres de la collection permanente sont toutes visibles. Un ensemble qui nous réjouit les yeux, le coeur et l'esprit. Et puis, il suffit de traverser le cours d'Albret, petite visite à la galerie des beaux-arts. Une exposition, "En regards, deux collections, une seule passion", présente les regards croisés du Frac-Aquitaine et du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux sur leurs collections. La mise en correspondance, en écho, en contraste et en confrontation est une réussite.
J'en retiens l'accrochage en parallèle d'une photographie représentant un bouc égorgé et une nature morte de Chardin. Superbe ! Les entrepôts Lainé, le Musée des Beaux-Arts, "En regards". Un vrai bonheur !
Avant de quitter Bordeaux, nous passons par l'hôtel pour récupérer nos bagages. J'en profite pour faire une photographie de la boite à compteurs, de l'autre côté de la rue. Elle sert de support d'affichages de toutes sortes : annonce de concerts, de débats, de manifestations, de vente d'objets divers et variés, de recherches ou d'offres de location, etc... mais en fait c'est surtout à mes yeux un support pour une exposition permanente d'art aléatoire. Sur la masse des murs de la ville, j'ai choisi d'élire cet espace comme oeuvre d'art aléatoire, c'est-à-dire sans auteur intentionnel.
Sur la route, alors que nous traversons Bernos-Beaulac encombré de voitures garées dans tous les sens pour cause de "Fête de la cerise", coup de téléphone des "petits". Ils sont sur le chemin du retour. Ils sont allés à Aubagne. Ils sont contents. Ils ont mis leurs pas dans les pas du petit Marcel... Pagnol. C'était le rêve de Charlotte et de Camille, qui connaissent par coeur "La gloire de mon père". Camille a fait des photographies des lieux : la maison de Marcel, la fontaine, le terrain de pétanque.
Sur la route, alors que nous traversons Bernos-Beaulac encombré de voitures garées dans tous les sens pour cause de "Fête de la cerise", coup de téléphone des "petits". Ils sont sur le chemin du retour. Ils sont allés à Aubagne. Ils sont contents. Ils ont mis leurs pas dans les pas du petit Marcel... Pagnol. C'était le rêve de Charlotte et de Camille, qui connaissent par coeur "La gloire de mon père". Camille a fait des photographies des lieux : la maison de Marcel, la fontaine, le terrain de pétanque.
Je me dis que décidément le week-end était sous le signe de Marcel : Marcel Azzola, Marcel Pagnol. Et toutes ces rues de Bordeaux, que j'ai parcourues en tous sens étant adolescent, tous ces pavés, ces pierres blondes au grain soyeux, ce sont des sensations qu'un autre Marcel savait si bien décrire. Marcel Proust. Jamais deux sans trois !
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