jeudi 3 juin - soledad "passage"
Mardi soir, retour d'Hossegor où nous venons de passer deux jours. Il était temps en effet de penser à préparer la villa pour l'été. Donc, "on a fait les vitres" et mis un peu d'ordre dans le jardin : tondre, couper quelques branches mortes, tailler la haie, etc... etc... Les vitres ! Vingt fois sur le métier... pour effacer les traces et ces reflets changeants qui vous narguent sans cesse...
Bref, en début de soirée, retour à Pau. Dans la boite à lettres, sous un paquet de publicités et autres réclames, une boite. Pas une "lettre MAX" envoyée par un distributeur, non, une "lettre Max" amicale avec, à l'intérieur, un vrai cadeau :
- "Passage / Soledad [Feat. Philip Catherine] plays the music of Frédéric Devreese", Soledad production 2006, EMI Music Belgium, 2006.
... et un article de Libé sur Galliano, un portrait, à l'occasion de la sortie de son "Bach".
Ce cadeau m'a touché pour plusieurs raisons : d'une part parce que la musique de Soledad est toujours un vrai bonheur et que cet album avait échappé à mon attention, d'autre part parce que ce geste d'amitié m'est personnellement précieux, enfin parce que l'existence d'un tel geste m'encourage à penser que d'autres relations sociales sont possibles que celles qui dominent dans notre république des avocats, ce monde de la lutte de chacun contre tous, ce monde où toute alliance annonce une trahison future. C'est dire avec quelle attention je me suis lancé dans l'écoute de "Passage".
Comment dire mes impressions ? Réflexion faite, autant citer ici le courriel que j'ai envoyé à [...] ; j'ai en effet essayé d'y exprimer au mieux mes sentiments et pour l'heure je ne vois pas comment mieux dire mes impressions.
"Bonjour [...]
[... ] Hier après-midi, je me suis payé le luxe, toutes affaires cessantes, d'écouter "Passage" en continu trois fois de suite. Un petit break en début de soirée, puis à nouveau "Passage", cette fois en fonction de telle impression que je voulais vérifier, de tel rapprochement que je voulais confirmer ou infirmer. Cette écoute n'a pas suffi pour épuiser mon intérêt, ni mon plaisir, et dès aujourd'hui je compte bien en reprendre une autre dose, certes plus homéopathique.
Il m'est pour l'instant difficile de mettre de l'ordre dans mes impressions. Celle qui domine est de toute évidence le plaisir d'avoir affaire à une oeuvre. Je veux dire par là que j'ai été très sensible à l'unité de composition, au rapport entre la totalité de l'album et ses différentes parties. Lié à cette impression, que par exemple j'ai éprouvée avec le "Bach" de Galliano ou avec "Piazzolla for ever", ce sentiment que le quintet s'est mis entièrement au service du compositeur. Il m'a semblé qu'en effet il y avait moins de "brillance" dans le jeu de Soledad, une autre forme de ruptures de rythme, et que cette différence correspondait à une volonté délibérée des interprètes pour servir Devreese. Dont, entre parenthèses, j'ai découvert la musique de films. Finalement, d'écoute en écoute, j'ai vraiment senti un climat, je dirais une vision du monde, s'installer. Cette sensation correspond à un critère très important pour moi. Il est difficile à expliciter ; il correspond à ce sentiment qu'il y a un créateur à l'origine de la musique que j'écoute, quelqu'un qui est capable de me faire sentir le monde d'une certaine façon, à l'inverse de nombre de disques où l'on n'a affaire qu'à un fabricant ou un producteur de musique, qui peut être plaisante ou agréable, mais sans plus.
Le texte de présentation fait référence à Bartok et à Stravinski. Honnêtement, ma culture ne me permet pas d'en juger la pertinence. Pour ma part, avec "Final Game II" et "Final Game IV", j'ai pensé à Gerschwin. J'ai beaucoup aimé, dans "Passage à 6", la "lisibilité" des moments de masses sonores et de solos, ainsi que leur articulation. J'ai donc découvert, avec Movie Tracks Suite, Devreese en tant que compositeur de musique de films; et j'ai été très sensible au climat qui s'installe au fil de la succession des titres. Par exemple, les titres 5, 6 et 7 m'ont touché par la fragilité qui en émane et j'ai été surpris d'entendre Soledad rendre aussi bien le climat d'incertitude qui en découle. En un sens je puis dire que j'ai découvert là une facette de Soledad. Et puis, il y a "Concertina Waltz". Etrange, inquiétant, troublant. Mais aussi "Romantic Waltz" : les notes de Philip Catherine, fascinantes. Quant à "Tango", ce morceau correspond bien à cette impression, que je signalais, à savoir que Soledad me parait moins "brillant" que d'habitude et c'est comme une autre dimension à leur jeu.
Bon ! Tout ça se bouscule un peu dans ma tête, mais ça va se décanter petit à petit.
Encore merci, mille fois. A bientôt, amicalement.
ps : quand je vois les cds de Soledad, je suis très impressionné par le fait qu'on sent bien que le quintet au fil de ses créations construit un projet exceptionnel. Je ne suis pas sûr que ce projet soit déjà conçu et programmé, mais j'ai le sentiment que ce que fait Soledad s'inscrit dans une cohérence de plus en plus complexe. Et évidemment on a envie de suivre leur parcours qui se construit comme un projet".
Bref, en début de soirée, retour à Pau. Dans la boite à lettres, sous un paquet de publicités et autres réclames, une boite. Pas une "lettre MAX" envoyée par un distributeur, non, une "lettre Max" amicale avec, à l'intérieur, un vrai cadeau :
- "Passage / Soledad [Feat. Philip Catherine] plays the music of Frédéric Devreese", Soledad production 2006, EMI Music Belgium, 2006.
... et un article de Libé sur Galliano, un portrait, à l'occasion de la sortie de son "Bach".
Ce cadeau m'a touché pour plusieurs raisons : d'une part parce que la musique de Soledad est toujours un vrai bonheur et que cet album avait échappé à mon attention, d'autre part parce que ce geste d'amitié m'est personnellement précieux, enfin parce que l'existence d'un tel geste m'encourage à penser que d'autres relations sociales sont possibles que celles qui dominent dans notre république des avocats, ce monde de la lutte de chacun contre tous, ce monde où toute alliance annonce une trahison future. C'est dire avec quelle attention je me suis lancé dans l'écoute de "Passage".
Comment dire mes impressions ? Réflexion faite, autant citer ici le courriel que j'ai envoyé à [...] ; j'ai en effet essayé d'y exprimer au mieux mes sentiments et pour l'heure je ne vois pas comment mieux dire mes impressions.
"Bonjour [...]
[... ] Hier après-midi, je me suis payé le luxe, toutes affaires cessantes, d'écouter "Passage" en continu trois fois de suite. Un petit break en début de soirée, puis à nouveau "Passage", cette fois en fonction de telle impression que je voulais vérifier, de tel rapprochement que je voulais confirmer ou infirmer. Cette écoute n'a pas suffi pour épuiser mon intérêt, ni mon plaisir, et dès aujourd'hui je compte bien en reprendre une autre dose, certes plus homéopathique.
Il m'est pour l'instant difficile de mettre de l'ordre dans mes impressions. Celle qui domine est de toute évidence le plaisir d'avoir affaire à une oeuvre. Je veux dire par là que j'ai été très sensible à l'unité de composition, au rapport entre la totalité de l'album et ses différentes parties. Lié à cette impression, que par exemple j'ai éprouvée avec le "Bach" de Galliano ou avec "Piazzolla for ever", ce sentiment que le quintet s'est mis entièrement au service du compositeur. Il m'a semblé qu'en effet il y avait moins de "brillance" dans le jeu de Soledad, une autre forme de ruptures de rythme, et que cette différence correspondait à une volonté délibérée des interprètes pour servir Devreese. Dont, entre parenthèses, j'ai découvert la musique de films. Finalement, d'écoute en écoute, j'ai vraiment senti un climat, je dirais une vision du monde, s'installer. Cette sensation correspond à un critère très important pour moi. Il est difficile à expliciter ; il correspond à ce sentiment qu'il y a un créateur à l'origine de la musique que j'écoute, quelqu'un qui est capable de me faire sentir le monde d'une certaine façon, à l'inverse de nombre de disques où l'on n'a affaire qu'à un fabricant ou un producteur de musique, qui peut être plaisante ou agréable, mais sans plus.
Le texte de présentation fait référence à Bartok et à Stravinski. Honnêtement, ma culture ne me permet pas d'en juger la pertinence. Pour ma part, avec "Final Game II" et "Final Game IV", j'ai pensé à Gerschwin. J'ai beaucoup aimé, dans "Passage à 6", la "lisibilité" des moments de masses sonores et de solos, ainsi que leur articulation. J'ai donc découvert, avec Movie Tracks Suite, Devreese en tant que compositeur de musique de films; et j'ai été très sensible au climat qui s'installe au fil de la succession des titres. Par exemple, les titres 5, 6 et 7 m'ont touché par la fragilité qui en émane et j'ai été surpris d'entendre Soledad rendre aussi bien le climat d'incertitude qui en découle. En un sens je puis dire que j'ai découvert là une facette de Soledad. Et puis, il y a "Concertina Waltz". Etrange, inquiétant, troublant. Mais aussi "Romantic Waltz" : les notes de Philip Catherine, fascinantes. Quant à "Tango", ce morceau correspond bien à cette impression, que je signalais, à savoir que Soledad me parait moins "brillant" que d'habitude et c'est comme une autre dimension à leur jeu.
Bon ! Tout ça se bouscule un peu dans ma tête, mais ça va se décanter petit à petit.
Encore merci, mille fois. A bientôt, amicalement.
ps : quand je vois les cds de Soledad, je suis très impressionné par le fait qu'on sent bien que le quintet au fil de ses créations construit un projet exceptionnel. Je ne suis pas sûr que ce projet soit déjà conçu et programmé, mais j'ai le sentiment que ce que fait Soledad s'inscrit dans une cohérence de plus en plus complexe. Et évidemment on a envie de suivre leur parcours qui se construit comme un projet".
Pour l'instant, je n'ai rien à ajouter, ni à retrancher. J'espère simplement que ces quelques paragraphes font comprendre pourquoi je suis à ce point sensible à l'attention amicale que manifeste cet album et qu'ils diffuseront le désir chez vous, amis lecteurs, de l'écouter. Que le plaisir se multiplie !
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