lundi 15 février 2010

mardi 16 février - paris jazz corner colissimo

Pendant notre séjour à Toulouse, un colissimo, envoyé par Paris Jazz Corner, est arrivé à Pau. Je suis allé, lundi matin, le chercher, muni de l'avis de passage, à la poste de l'Ousse-des-Bois, un quartier de la ville réputé sensible. La file est longue : une mère avec son enfant dans un landeau, un grand-père maghrébin qui vient vérifier si sa pension a été créditée sur son compte, un homme, également maghrébin, qui envoie un mandat au pays, une femme voilée qui parle à une autre femme voilée, un turc avec sa femme, un indien, à moins qu'il ne soit pakistanais. En entrant, j'ai croisé un jeune homme d'origine asiatique. Je le connais, c'est "l'héritier" du "chinois". De part et d'autre de la porte d'entrée du bureau de poste, un homme et une femme avec un nourrisson sur les bras : ils mendient. Dans le bureau de poste, je croise l'un de mes voisins : ça fait au moins deux immigrés de quatrième génération. Plus les trois employés derrière leur guichet. Encore que la jeune femme qui me remet mon colissimo n'est peut-être que de troisième génération. C'est un quartier assez divers. Il n'est pas sans rappeler le quartier Arnaud Bernard à Toulouse. Les balcons sont décorés avec des paraboles. Au pied des tours rénovées, il en reste deux, les autres ont été remplacées par un habitat pavillonnaire, un grand garage a été transformé au fil des années en mosquée. Avec un vrai minaret couvert de tuiles vernissées vertes. Nous sommes à cinq minutes du centre de Pau et il y a encore aujourd'hui un paysan, propriétaire de trois champs à un carrefour, qui fait traverser ses vaches deux fois par jour. Bientôt un promoteur lui rachètera son terrain pour y construire quelque résidence du type "Les Jardins du Roy" ou "Les Hespérides". Avec portail à code et parking sécurisé. J'aime ce quartier : il a une vraie identité. Il change. Il vit.

Rituel : arrêter le cours du temps. Observer le colissimo, la facture de Paris Jazz Corner et surtout cette mention "documents ci-inclus", promesse de deux cds.
A l'intérieur du colis, deux cds donc que j'ai commandés sans rien connaitre de leur contenu. Simplement, sur le site de Paris Jazz Corner, j'ai repéré ces deux albums à la rubrique "Accordéon". Je n'ai pas voulu en savoir plus. C'est ma manière de cultiver mon goût pour les surprises... contrôlées.

Le premier disque, vingt-quatre titres, est consacré à un musicien dont j'ignorais tout jusqu'à présent : "Lead Belly, Blues & Folk Singer". Partie 1 (12 titres) : The Bluesman ; partie 2 (12 titres) : The Songster. Les enregistrements se répartissent sur la période 1935-1945. En fait, c'est un disque où Lead Belly joue de la guitare et chante. Sur trois morceaux, il y a un harmonica : Sonny Terry. Sur un morceau, notre homme, assez bagarreur, si j'en juge par ses condamnations et séjours en prisons, joue du mélodéon (appelé concertina dans la notice de présentation). Trois harmonicas, un mélodéon : quatre morceaux sur vingt-quatre. C'est peu et c'est bien. L'harmonica préfigure le style de Clifton Chénier. Le mélodéon m'a fait penser aux quadrilles de la Guadeloupe et aux mélodies cajun. La voix et la guitare de Lead Belly, c'est tout à fait le vrai blues, bien hypnotique.

L'autre disque est pour moi une découverte absolue. Je ne sais rien des musiciens qui l'ont réalisé. Le titre :"David Yengibarjan with Frank London / Pandoukht". David Yengibarjan, accordéon ; Frank London, trompette ; Jozsef Horvath Barcza, basse ; Andras Dés, percussion. A ce quartet s'ajoute Gabor Gado, guitare, sur cinq titres. En lisant la notice, j'apprends que "ceux qui ne vivent plus dans leur pays natal sont appelés pandoukht en arménien" et que David Yengibarjan n'est pas retourné en Arménie depuis 1995. Certains des neuf titres sont des créations originales de David Yengibarjan ou de Frank London. D'autres sont des arrangements d'airs traditionnels arméniens ou juifs. C'est un disque BMC : Budapest Music Center Records, publié en 2003.



Je n'ai pu écouter l'ensemble de cet album qu'une seule fois, mais je sais déjà que c'est un beau disque, du jazz comme je l'aime, créatif et distancié, finalement assez intellectuel, mais pas abstrait pour autant. Avec des improvisations comme autant d'invitations à s'engager sans bagages (intellectuels ou scolaires) dans des chemins de traverse, mais sans aller jusqu'au free pour autant... Un équilibre délicatement déjanté !


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