samedi 5 février 2011

dimanche 6 février - jouer vs faire danser

Il y a, dans le numéro 105,  février 2011,  de la revue "Accordéon & accordéonistes", une série de portraits, pages 44-49, consacrés à des accordéonistes qui ont comme activité principale l'animation de bals. Sont ainsi présentés Aurélien, Fabien Veyriras, Alberto Garzia et Jean-Pierre Le Goff.

Aurélien qui concilie son amour du latin et du grec ancien avec celui de sa terre du Tarn, qui articule avec bonheur son travail de professeur de lettres en collège et l'animation de bals musette ou de thés dansants ; Fabien Veyriras qui s'est nourri en cachette de vinyls de Jean Ségurel comme d'autres boivent leur biberon, qui défend sa région, son passé, ses racines et qui est un fidèle des instruments Maugein ; Alberto Garzia, qui a 470 oeuvres déposées à la Sacem et une multitude d'albums et de cassettes, certains en France d'autres en Italie, et qui met son piano à bretelles au service d'un répertoire qui va de la variété au disco en passant par le musette ; Jean-Pierre Le Goff, qui décide très tôt d'être accordéoniste et chef d'orchestre et de faire danser les gens; qui donc privilégie le caractère "boite à frissons" de l'accordéon.

 Cette série de portraits est éminemment sympathique, car elle présente des personnalités attachantes, mais aussi, à travers ces personnages, des types d'accordéonistes, des figures emblématiques en quelque sorte.
Mais, plus précisément, un passage a retenu mon attention. Jean-Pierre le Goff explique qu'il a fait son premier bal à 16 ans et il ajoute :" J'ai mesuré alors que jouer était une chose et faire danser en était une autre". Bref, il ne suffit pas d'avoir l'intention de jouer pour faire danser les gens pour qu'automatiquement ça marche. De l'intention à son résultat, c'est certainement un peu plus complexe, disons un peu plus interactif.

Mais cette phrase de J.-P. Le Goff m'intéresse aussi en un autre sens, car j'ai toujours pensé que jouer de la musique et faire danser étaient deux pratiques, non seulement différentes, mais même incompatibles. Interpréter de la musique pour l'écoute et faire danser des gens, ça n'est pas conciliable : l'un ou l'autre, il faut choisir. J'ai été frappé en effet d'observer que lorsque Michel Macias ou René Lacaille par exemple invitent leurs auditeurs à danser, souvent avec une vaine insistance, il y a comme un flottement dans l'assemblée. On ne sait plus où l'on est. En revanche, il y a quelques jours, à Bagnères de Bigorre, les Pulcinella, au terme de leur concert, on repris un twist, l'ont annoncé et on invité alors les gens à danser, et ça a bien fonctionné. Pourquoi ? Parce que la partie concert était clairement finie et que l'on pouvait passer à autre chose. Les intentions et les attentes n'étaient plus les mêmes. Une des raisons de cette incompatibilité que j'essaie d'analyser à grands traits tient à mon avis au phénomène suivant : quand un accordéoniste, par exemple, joue un morceau écrit ou a fortiori improvisé il développe en quelque sorte son propre discours et c'est bien un discours que l'on attend ; par contre, j'ai noté - c'est particulièrement vrai pour Macias ou Lacaille dans les moments d'ambiguité concert / bal - que lorsqu'il veut faire danser des gens, il s'adapte aux mouvements des danseurs pour les guider : il y a comme une interaction qui peut conduire à la répétition jusqu'à épuisement de ceux-ci, répétition qui produit un état de quasi transe attendue chez les-dits danseurs, alors que la même répétition finit par épuiser d'ennui l'auditeur pur.

Bien entendu, il faudrait d'autres observations et d'autres notions que les miennes pour analyser ce phénomène. En attendant, j'y réfléchis.  

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