dimanche 8 juillet 2012

dimanche 8 juillet - francis varis... un point c'est tout !

Quand j'ai appris que Francis Varis était sur le point de "sortir" un disque [1] consacré aux suites pour violoncelle de J.-S. Bach, je n'ai eu de cesse de me le procurer et de l'écouter. Si j'ai été surpris par cette information, je n'ai pas vraiment été étonné, car je ne l'aurais certes pas prédite, mais en même temps rien ne me paraissait s'opposer à ce projet tant le talent de F. Varis est grand.

J'ai beaucoup aimé ce disque [2] et je l'apprécie encore beaucoup pour l'interprétation personnelle que F. Varis donne de ces suites, mais aussi pour le commentaire qu'il en donne et par le témoignage de Titi Robin sur son comportement : pas un seul jour sans Bach. Toujours avant le petit déjeuner, comme une manière rituelle d'entrer dans la journée.

En écoutant ce disque et en lisant les textes qui le présentent, j'ai repensé à ces deux notions conçues par Roland Barthes pour décrire les deux composantes essentielles de tout plaisir esthétique : d'une part, le studium, qui correspond au plaisir d'apprendre quelque chose, d'avoir affaire à des connaissances (ici, par exemple, j'ai découvert en quoi consistaient ces suites du point de vue formel et en particulier leur organisation stricte) ; d'autre part, le punctum, qui correspond au plaisir d'être touché ou, si j'ose dire, frappé de plein fouet par un élément qui déclenche en nous le plaisir proprement esthétique. Celui qui est de l'ordre de la sensation et de l'émotion qui en découle. Quelque chose qui est de l'ordre du choc. Je pourrais ainsi citer plusieurs passages du disque où je me sens comme traversé, transpercé par ce que j'entends. Quelque chose qui est de l'ordre de l'immersion dans la musique et qui interdit, sur l'instant, toute distance réflexive ou critique. Sans oublier que dans punctum il y a point et indirectement poignant.

Roland Barthes parle de punctum. Justement, arrêtons-nous un peu sur cette notion car on la retrouve  à plusieurs reprises à l'occasion de cet opus de F. Varis, qui nous occupe. Celui-ci nous dit en effet que le texte de Bach se présente en tant que tel comme un flux indifférencié. Je cite :" L'écriture de Bach semble un flux continu, sans indication de phrasé ni de nuances. Tout reste à faire. Commence alors un travail jamais achevé de sculpteur ; au burin tailler dans ce flux et révéler la forme et le relief des phrases, les césures, les respirations". Il appartient donc à l'interprète de mettre la ponctuation - points et virgules -, c'est-à-dire la respiration. Et je note à ce sujet que pour F. Varis l'accordéon est moins un instrument à clavier qu'un instrument à vent. Point, ponctuation, punctum... respiration, souffle vital.

Mais ce n'est pas tout. Point, pnctum... ce sont des mots de la même famille que ponctuel, ponctualité.
Or, Titi Robin nous dit bien qu'en tournée F. Varis est d'une ponctualité sans failles pour se confronter chaque matin à l'oeuvre de Bach, en particulier au texte des suites. Mais encore, on doit bien remarque que qui dit point dit contrepoint . C'est bien la moindre des choses pour qui a l'audace, jour après jour, d'interpréter Bach. Mais ce n'est pas tout ; point fait penser à points sur les i et donc à pointilleux. On imagine assez bien F. Varis doué d'une telle qualité, au moins en ce qui concerne sa relation à l'oeuvre de Bach. Minutieux jusqu'à l'excès, scrupuleux, jamais satisfait pleinement, plein de passion pour les belles formes musicales, animé par un appêtit insatiable de formalisme.

Ce sont ces quelques réflexions qui m'autorisent à les résumer en un mot : Francis Varis, un point c'est tout !   


[1] En fait il s'agit d'un cd pour les suites 1, 5 et 6 et d'une offre de téléchargement pour les 2, 3 et 4. J'ignore d'ailleurs la raison de cette double distribution.

[2] Il s'agit bien du cd et des suites 1, 5 et 6. Je ne suis en effet guère adepte du téléchargement.

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