mercredi 28 janvier 2015

jeudi 29 janvier - la vie en rose : un objet simplexe...

Je prends le risque de paraitre pédant. En écoutant "La vie en rose" de Richard Galliano et Sylvain Luc, un album qui se donne comme une évidence de plaisir, une notion m'est revenue à l'esprit, une notion de la pensée complexe ou, si l'on veut, systémique. Cette notion est la simplexité.

Précisons en quelques mots de quoi il s'agit. Pour cela, je me réfère à quelques éléments empruntés à Wikipédia :

La simplexité connote l'"art de rendre simple, lisible, compréhensible les choses complexes".
De même que "complexe" ne doit pas être confondu avec "compliqué", "simplexe" ne doit pas être confondu avec "simple".
Une "chose simplexe" est une "chose complexe dont on a déconstruit la complexité que l'on sait expliquer de manière simple".

En référence à ces éléments de définition, je dirais volontiers que cet album est une "chose simplexe" en ce sens qu'il se présente comme simple parce qu'il résulte d'une maîtrise et d'une assimilation par le duo de la musique qu'il interprète, pour ne pas dire qu'il crée pour notre plus grand plaisir. Un maximum de complexité qui se donne comme une évidence immédiate. Un plaisir simple, justement parce que tout le travail de création, de déconstruction-reconstruction, se présente comme allant de soi, comme facile.

Mais, au fil des écoutes de cet album, me revient à l'esprit que Richard Galliano est aussi le créateur du "New Musette". Je manque trop d'éléments sur son parcours pour prétendre en saisir la signification, mais j'ai l'intuition qu'il serait plus qu'intéressant de repérer les jalons qui le balisent de "New Musette", au début des années 1990, jusqu'à "La vie en rose" en 2015.

"New Musette", un album de 1991, publié par le prestigieux Label bleu. "New Musette", à l'instar du Tango Nuevo d'Astor Piazzolla, le maître, l'ami, et en l'occurrence le modèle. Rappelons que cette œuvre est dédiée à Laura et Astor Piazzolla. Une manière de prouver que l'accordéon n'est pas cantonné au musette et qu'il peut s'aventurer en territoire de jazz. Musette, tango, blues, musiques respectivement des Français et des Italiens, des Italiens et des américains du sud, des Africains et des Américains du Nord, trois styles que le jazz peut reprendre à son compte. En présentation de cet album, Richard Galliano explique qu'à son sens on ne peut plus jouer le musette comme dans les années 30 et donc qu'il le joue sous l'influence de Piazzolla, de Coltrane, de Bill Evans et de Debussy, qu'il ne cessera jamais d'admirer au plus haut point.

Rappelons que "New Musette" est joué par un quartet de haut vol : Richard Galliano, accordéon, Philippe Catherine, guitare, Pierre Michelot, contrebasse et Aldo romano, batterie. Excusez du peu !

Plus tard, en 2007, c'est "L'hymne à l'amour". Richard Galliano, accordéon, Gary burton, vibraphone, George Mraz, contrebasse et Clarence Penn, batterie. Un répertoire aux influences multiples : Piazzolla, Bill Evans, Marguerite Monnot, Bach, etc... Des influences profondes, de longue date ou plus récentes, ou du moins plus explicites, comme Edith Piaf ou Bach, et que l'on retrouvera plus tard...

En 2008, c'est "From Billie Holiday to Edith Piaf" à Marciac. The Wynton Marsalis Quintet et Richard Galliano. Au cœur de ce concert et de l'album, le blues, l'esprit du blues, l'âme du blues comme élément commun à Billie Holiday et à Edith Piaf. Parmi les œuvres de cet album, "La vie en rose" avec Hervé Sellin comme invité au piano. Et puis, déjà, "La foule", que l'on retrouve comme titre 6 de "La vie en rose".

Enfin, en cette année 2015, c'est "La vie en rose". Un duo accordéon-guitare. Un moment acoustique pur. On y retrouve l'"Hymne à l'amour" et "La Foule". On y découvre en titre 1, le premier, et 16, le dernier, deux compositions de Gus Viseur : "Douce joie" et "Swing Valse". Gus Viseur, le jazz-musette par excellence ! La référence ! En présentation de cet album, Richard Galliano explique comment  à l'origine de cet album il y a en quelque sorte un voyage au Brésil et cette expérience que le forro est pour ainsi dire le patrimoine de ce pays, comme le musette est notre patrimoine. Une prise de conscience déterminante. C'est elle en effet qui lui a donné l'idée que Gus Viseur et Edith Piaf étaient notre patrimoine même. Donc, un trésor à sauver. A sauver en le faisant vivre. Sûrement pas, comme le disait Richard, en le jouant comme en 1930. Et puis il y a la "Flambée montalbanaise" et l'"Hymne à l'amour". Entre autres titres inscrits dans notre tradition au plus profond de nos mémoires.

Quelques mots encore de Sylvain Luc à propos d'Edith Piaf  :"c'est la plus grande chanteuse du patrimoine français [...] Piaf est notre blues à nous". Et pour finir, quelques mots de Franck Laurent, qui a écrit la présentation :" Les deux compères se saisissent donc de ce trésor et relèvent le défi : lui conserver sa spontanéité et son authenticité tout en faisant surgir quelque chose de nouveau. Le parti pris est de ne pas trop répéter pour préserver la fraicheur, et de jouer un instrument  acoustique pour privilégier le dialogue et l'écoute".

Parti pris, pari réussi ! Vous avez dit :"un album simplexe"? Oui !





  

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